vendredi 27 février 2009

Journal du Monde n°13 : la France « aux mains de la rue »



Les Français ont guillotiné le roi ; au nom d’une mesure symbolique, ils peuvent renverser le pays. Celui que certains comparent à Napoléon le petit déclarait ainsi le 29 janvier de cette année que la France est un pays régicide. Celle-ci ne tient pas seulement sa réputation culinaire. Le peuple y est révolutionnaire. Le besoin n’est pas de remonter loin pour dresser une liste assez longue. 12 janvier : France 3 en grève, SNCF aussi. Les enseignants-chercheurs se révoltent, les antillais militent contre la vie chère. La cause est large, l’ensemble des syndicats se rassemblent. Les instituteurs refusent de travailler. La poésie et Facebook s’y mettent aussi ! Et lorsque l’effet de masse devient efficace, c’est carrément une journée nationale qui est organisée (29 janvier).

L’Allemagne, comme le reste du Monde, subit aussi la crise et pourtant, on n’y retrouve pas les faits énoncés. La France serait imprégnée de la culture du conflit ; une forme d’infirmité que ne partageraient pas nos voisins européens. Certains parlent ainsi de tradition nationale, d’un droit de paralyser. Je ne puis soutenir le conflit mais il me semble que la question est à poser autrement. Les chiffres sont effectivement là. En Allemagne où le fait est plus rare, les syndicats prennent le relai sur les employeurs ; plus clairement : journée grévée = journée payée. Mais en France, la manifestation n’est pas inaction. Mes jours à Berlin m’amenaient à en débattre. Réflexion fut juste, remarquez que les réformes qui mènent à la rue sont franchement peu étudiées par ceux qui les proposent. Inscrit dans un monde dirigé par le capitalisme, l’Hexagone n’échappe pas à la règle. Seulement, le but premier de l’Etat – qui n’est pas privé – n’est pas d’ajouter, à tout prix, des pourcentages à sa marge de profit. J’ai entendu parler de service public. Alors quand, sur leur bateau qui n’est pas gonflable, notre président et son gouvernement prennent la décision d’enrichir ceux qui le sont déjà, je comprends les révoltes. Je ne parle pas uniquement de bourse et de parachutes dorés, mais de culture aussi lorsque, par exemple, « enseignant » et « chercheur » ne peuvent plus s’accorder. Je poserai deux camps alors : celui du gouvernement qui déclare que la « France n’est pas le pays le plus facile à gouverner » et celui de la rue qui radote que la France n’a pas le gouvernement le plus facile à supporter.

Cestlacrise.com. Ca existe. Dans un français correct. Je précise car beaucoup accordent maintenant le .com à de nouvelles interjections. Nouvelle révolte : il ne s’agit plus d’aligner des mots pour faire des phrases et le rebelle de 2009 chérit le néographisme que son parent ne comprend pas. Le verbe français n’est plus celui de Molière, la nouvelle génération le rejette et, là encore, le fait est précisément français. L’Allemand et moi le trouvons détestable pendant que d’autres l’approuvent et j’attends qu’ils m’en expliquent la raison. Un fait général que je pose comme hypothèse explicative existe : faire semblant de faire semblant de ne pas savoir quand réellement on ne sait pas. La génération qui porte des jeux d’échecs autour des pieds et qui ne connait que la communication faussement écrite par SMS ou MSN est paresseuse et elle n’a plus envie de savoir si le COD est avant ou après l’auxiliaire. Parce qu’elle ne sait plus ce qu’est ni un COD ni un auxiliaire. Alors elle fait des fautes ekspré^^ et se vante de neu pa tptp savoar koman sa sèkri^^ ptdr. Ils prennent le dictionnaire comme on a pris la Bastille. L’exclamation n’existe que là où elle n’a aucun intérêt, sinon sé kro la onte ???;! et les sujets qui ne sont pas de l’ordre du sentiment, de l’expression de la honte ou du moment présent ne sont pas intéressants. taiime tro leii piiix dOssiier ceii cho mai teii kro bL ; il faut doubler les i.

A chaque ascendance ses inquiétudes. Les troubles sont omniprésents mais le mot kriiz n’existe pas. ison tro kon2 tfason lol^^. Gegen Gott und die Welt.

Céline


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